Le 8 juillet, une équipe de scientifiques du Muséum national d’Histoire naturelle et du CNRS a mis le cap sur le Spitzberg, l’île principale de l’archipel du Svalbard, territoire de l’Arctique situé à l’est du Groenland, à la recherche de l’origine des insectes pendant cinq semaines. Cette équipe pluridisciplinaire est de retour. Elle vient de découvrir un nouveau gisement d’ambre dans les sédiments tertiaires d’une des vallées glaciaires de ce territoire.
Consacrée à l’étude de l’origine évolutive des insectes, cette expédition avait pour objectif de mettre au jour des fossiles d’arthropodes terrestres, et tenter de dater la sortie des eaux des premiers insectes (Insecta et Hexapoda), ainsi que l’apparition des lignées ailées au Dévonien. L’enjeu était de taille, car, à ce jour, très peu de gisements de fossiles d’arthropodes terrestres de ce type ont été découverts dans le monde.
La majeure partie de la mission s’est déroulée dans la péninsule du Dicksonland, dans les vallées glaciaires qui entourent la ville fantôme russe de Pyramiden. Le paysage spectaculaire de vieux grès rouges de cette région est très favorable à la découverte de fossiles : les versants des montagnes, avec leurs différentes strates qui se superposent comme les pages d’un livre, présentent en effet une continuité stratigraphique du Dévonien (de -416 à -359 millions d’années) au Mississippien (de -345 à -320 millions d’années), avec un passage progressif et alterné marin-continental. Ce type de paléo-environnement correspond précisément à celui des premiers « insectes », puisque ces derniers sont apparentés aux crustacés marins.
Ce nouveau gisement d’ambre (substance organique d’origine végétale), découvert lors de l’expédition, est le plus septentrional trouvé à ce jour. Cette découverte ouvre de nouvelles perspectives de recherche sur les paléo-environnements de cette région du monde, actuellement sous climat semi-désertique polaire mais qui était en situation tempérée chaude et recouverte d’une végétation luxuriante pendant le tertiaire. En effet les inclusions (des bactéries aux insectes) que peuvent renfermer cet ambre peuvent donner des informations uniques. Pendant cette expédition, l’équipe de recherche a également découvert plusieurs autres gisements paléontologiques dans les couches plus anciennes (vieux grès rouges dévoniens) dont le matériel sera étudié dans les laboratoires du Muséum national d’Histoire naturelle, comme des spectaculaires traces de Trilobites (Arthropodes aquatiques).
Des données sur la biodiversité actuelle des insectes ont également été acquises lors de cette expédition. Notamment sur les Collemboles, ces « insectes » primitifs très bien adaptés aux conditions extrêmes et dont la diversité est étonnante au Spitzberg et sur les Diptères.
– André NEL*, paléoentomologiste, responsable des collections zoologiques d’arthropodes du Muséum national d’Histoire naturelle (MNHN), responsable de la mission ;
– Jean-Claude ROY, géologue, adjoint du chef de mission, responsable sur le terrain, bénévole au Muséum ;
– Jean-Michel BICHAIN, malacologue, attaché au Muséum, responsable logistique de la mission ;
– Cyrille D’HAESE*, entomologiste, chercheur au CNRS ;
– Romain GARROUSTE*, entomologiste et paléoentomologiste au Muséum.
– Dany AZAR, paléoentomologiste, Université Libanaise, Beyrouth, Liban, associé au Muséum.
L’expédition scientifique polaire « A la recherche des premiers insectes » a reçu le soutien de l’Institut polaire français Paul-Emile Victor (IPEV).
Pour en savoir plus : http://www.mnhn.fr
Le blog de l’expédition : http://caracolexpedition.wordpress.com
* UMR MNHN / CNRS 7205 OSEB « Origine, structure et évolution de la biodiversité ». Cette Unité Mixte de Recherche a pour objectif de répondre aux questions concernant l’origine de la biodiversité, les modalités de diversification des espèces et la mise en place des
communautés animales en lien avec l’évolution spatio-temporelle des taxons. L’approche privilégiée par l’équipe est la systématique phylogénétique et ses outils moléculaires, génétiques, morphologiques et morphométriques.
Notes :
Depuis plus de 300 ans, le Muséum national d’Histoire naturelle (MNHN) est une référence mondiale pour l’étude et de la protection de la
biodiversité. S’appuyant sur ses 5 missions – recherche, collections, enseignement, expertise, diffusion – il appréhende les problématiques
naturalistes et environnementales de manière à la fois transdisciplinaire et très spécialisée. Consulter le site web
Le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) est un organisme public de recherche français. Il produit du savoir et met ce
savoir au service de la société. Avec plus de 32 000 personnes, le CNRS exerce son activité dans tous les champs de la connaissance, en
s’appuyant sur plus de 1 200 unités de recherche et de service.
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L’Institut polaire français Paul Émile Victor (IPEV) est un Groupement d’Intérêt Public (GIP) constitué par neuf organismes publics ou
parapublics (Ministère de la recherche, Ministère des affaires étrangères, CNRS, Ifremer, CEA, TAAF, Météo-France, CNES, Expéditions
Polaires Françaises). L’IPEV est une agence de moyens et de compétences au service des laboratoires nationaux rattachés à des structures
dont la vocation est la recherche scientifique : Universités, CNRS, CEA, INRA… Son rôle est d’offrir un cadre juridique ainsi que les moyens
humains, logistiques, techniques et financiers nécessaires au développement de la recherche française dans les régions polaires.
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