Dans un article du journal Nature paru aujourd’hui, l’expérience nippo-européenne ASACUSA annonce une nouvelle mesure de la masse de l’antiproton d’une précision proche du milliardième. Mesurer avec précision la masse de l’antiproton constitue une méthode privilégiée en vue de chercher à comprendre pourquoi la nature semble préférer la matière à l’antimatière.
« C’est un résultat très satisfaisant, a déclaré Masaki Hori, chef de projet au sein de la collaboration ASACUSA. Cela signifie que notre mesure de la masse de l’antiproton relativement à celle de l’électron est maintenant presque aussi précise que celle de la masse du proton. »
Les protons ordinaires constituent environ la moitié du monde qui nous entoure, nous y compris. Avec autant de protons, il pourrait sembler naturel de supposer que leur masse puisse être mesurée avec davantage de précision que celle de l’antiproton. Après le résultat obtenu par ASACUSA, ce principe reste valable, mais il s’en faut de peu. Au cours des prochaines expériences, ASACUSA espère mesurer la masse de l’antiproton avec une précision bien plus grande que celle du proton. Toute différence de masse entre le proton et l’antiproton constituerait un signal pour la nouvelle physique, en indiquant que les lois de la nature pourraient être différentes pour la matière et l’antimatière.
Pour effectuer ces mesures, les antiprotons sont d’abord piégés à l’intérieur d’atomes d’hélium, où l’on peut les « chatouiller » à l’aide d’un faisceau laser. La fréquence du laser est ensuite ajustée de manière à faire faire un saut quantique aux antiprotons à l’intérieur des atomes, et c’est à partir de cette fréquence qu’il est possible de calculer la masse de l’antiproton. Toutefois, une source d’imprécision importante provient du fait que les atomes « frétillent », de sorte que ceux qui s’approchent du faisceau présentent des fréquences légèrement différentes de ceux qui s’en éloignent. C’est par un effet similaire que, lorsqu’un piéton entend une ambulance s’approcher dans la rue, il a l’impression que le son de la sirène change de hauteur au moment où elle passe devant lui. Lors de sa précédente mesure, en 2006, l’équipe d’ASACUSA avait utilisé un seul faisceau laser, et la précision qu’il était possible d’atteindre à l’époque était limitée par cet effet. Cette fois, les chercheurs d’ASACUSA ont utilisé deux faisceaux de sens inverse. Grâce à cette méthode, les frétillements provoqués par chacun des deux faisceaux se sont annulés en partie, de sorte que la précision de la mesure a été multipliée par quatre.
« Imaginez que l’on cherche à peser la tour Eiffel, explique Hori. Le niveau de précision que nous avons atteint équivaut à peu près à effectuer cette mesure avec une marge d’erreur correspondant au poids d’un moineau perché au sommet. La prochaine fois, ce sera une plume. »
Source : CERN
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