Le mathématicien Benoît Mandelbrot, célèbre inventeur des fractales, est décédé à l’âge de 85 ans. Le CNRS rend hommage à ce génie des mathématiques qui y mena ses recherches entre 1949 et 1957.
« Benoît Mandelbrot était un visionnaire qui a su trouver des lois et de l’ordre dans des phénomènes d’apparence prodigieusement complexe », souligne Alain Fuchs, président du CNRS. « Il a fondé une vision géométrique de la complexité en développant la théorie des objets fractals, qui a eu des applications pour la synthèse d’image, la description de la turbulence, la finance et bien d’autres domaines encore ».
Benoît Mandelbrot est né en 1924 à Varsovie, en Pologne, dans une famille juive d’origine lithuanienne. Fuyant le nazisme, sa famille se réfugie à Paris en 1936 où il est initié aux mathématiques par deux de ses oncles. C’est le début d’une vocation et d’une carrière brillante et féconde en mathématiques. Reçu à l’École Polytechnique de Paris en 1944, il alterne ensuite des séjours aux États-Unis et en France, où il passe sa thèse en 1952. Il effectue ses recherches au CNRS de 1949 à 1957 puis est employé par la société américaine IBM en 1958 où il travaillera 35 ans. Il terminera sa carrière comme professeur à l’université de Yale.
Inventeur des fractales – ces objets géométriques qui ont la propriété d’être décomposés en fragments dont chacun a la même forme que le tout – ses travaux novateurs permettent une approche totalement nouvelle de certains problèmes grâce à une description géométrique. Il fut aussi un pionnier de l’utilisation de l’informatique comme outil d’expérimentation mathématique. La géométrie fractale dont il est le père fondateur avait pour objectif d’étudier et de classifier des phénomènes naturels que l’on pensait non susceptibles d’une modélisation mathématique, car présentant une très grande complexité à toutes les échelles, comme les flocons de neige, les nuages ou les côtes bretonnes… Ses travaux ont révolutionné notre façon de percevoir la nature et ouvert de nouveaux terrains de recherche à plusieurs branches des mathématiques (systèmes dynamiques, processus aléatoires…). Mais son apport le plus spectaculaire fut sans doute l’élaboration de concepts et d’outils mathématiques qui ont permis de dévoiler des correspondances insoupçonnées entre des parties de la Science aussi diverses que l’astronomie, la turbulence, la physique des matériaux, la géologie, l’hydrologie, la chimie, la médecine, l’économie, le traitement du signal et de l’image ou encore la linguistique. Benoît Mandelbrot a été à l’origine par exemple d’un modèle d’évolution des cours de la bourse basé sur la géométrie fractale.
Pour Guy Métivier, directeur de l’Institut national des sciences mathématiques et de leurs interactions du CNRS : « Benoît Mandelbrot était un esprit inclassable. Si l’« ensemble de Mandelbrot » est devenu l’un des plus fascinants objets des mathématiques et les « cascades de Mandelbrot » le modèle le plus utilisé de turbulence, ce scientifique universel a apporté des contributions profondes aussi bien en mathématiques, qu’en physique, chimie, économie… révélant, grâce à la géométrie fractale, des liens insoupçonnés entre ces disciplines… sans oublier sa critique féroce de l’utilisation en mathématiques financières du modèle de Black et Scholes, de nombreuses années avant que la crise ne lui donne raison ».
Il est l’auteur de nombreuses publications dont Les objets fractals, forme, hasard et dimension (1975) ou La géométrie fractale de la nature (1982), qui auront un grand retentissement, bien au-delà de la communauté scientifique. Scientifique visionnaire, Benoît Mandelbrot a été nommé Chevalier dans l’Ordre National de la Légion d’Honneur en 1989 puis promu Officier en 2006. Il a reçu les plus hautes distinctions internationales dont le prix Wolf en physique en 1993 et le Japan Prize for science and technology of complexity en 2003.
Source: communiqué de presse du CNRS
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