Le manteau de Mars se refroidirait de 30 à 40°C par milliard d’années. C’est la conclusion des chercheurs du CNRS et de l’Université Paul Sabatier à Toulouse, qui ont reconstitué l’évolution thermique de cette planète depuis 4 milliards d’années, pour la première fois, à partir de la composition des roches volcaniques observées par satellite. Ces valeurs impliquent un refroidissement plus lent que pour la Terre (70 à 100°C par milliard d’années). Elles soulignent la particularité de notre planète, dont l’évolution thermique est influencée par la tectonique des plaques. Les résultats sont publiés dans la revue Nature (advanced online publication du 6 avril 2011).
L’histoire de l’eau et l’évolution du climat sur Mars ont fait l’objet d’une attention considérable ces dernières décennies. Cependant, l’évolution d’une planète doit être envisagée dans sa globalité. Cela nécessite de comprendre l’évolution thermique et dynamique de l’intérieur planétaire en relation avec l’activité volcanique ou tectonique. En effet, la formation d’un volcan résulte de la fusion partielle des roches du manteau (1), et de l’ascension de ces liquides magmatiques jusqu’à leur éruption en surface. La composition des liquides magmatiques est contrôlée par la profondeur (pression) et la température à laquelle la fusion a lieu. Par exemple, les roches volcaniques terrestres d’âge archéen (il y a environ 3 milliards d’années) suggèrent que le manteau de notre planète était plus chaud à cette époque qu’aujourd’hui. C’est ce lien entre la chimie des magmas et les conditions de fusion que les chercheurs de l’Institut de recherche en astrophysique et planétologie (CNRS/Université Paul Sabatier), à l’Observatoire Midi-Pyrénées, ont exploité pour Mars.
L’instrument Gamma Ray Spectrometer, à bord de la mission américaine Mars Odyssey, a produit des cartes d’abondance de plusieurs éléments chimiques à la surface de la planète Mars. Les chercheurs se sont surtout intéressés au silicium, au fer et au thorium, particulièrement sensibles aux conditions de fusion. L’abondance de ces trois éléments sur douze régions volcaniques martiennes constitue un formidable enregistrement, durant quatre milliards d’années, des processus de fusion dans les profondeurs du manteau.
Les chercheurs ont montré que les variations en fer, silicium et thorium dans les roches volcaniques témoignent d’une diminution de la température du manteau au cours du temps, d’un épaississement de la lithosphère à la base de laquelle se produit la fusion et d’une origine des magmas de plus en plus en profondeur.
Ces résultats permettent de reconstituer avec précision l’évolution thermique de Mars. Le refroidissement de Mars (30 à 40°C par milliards d’années) apparaît plus lent que pour la Terre (70 à 100°C par milliards d’années). Il faut sans doute en chercher la cause dans l’absence de tectonique des plaques sur Mars. Cette étude met aussi en lumière la diversité des scénarii d’évolution planétaire et permet de comprendre pourquoi une planète voit son activité volcanique s’éteindre (lorsque le magma ne parvient plus à traverser une lithosphère devenue trop épaisse). Ces résultats offrent un cadre nouveau pour aborder de nombreuses questions telles que les causes de l’arrêt du champ magnétique interne de Mars il y a 4 milliards d’années, l’origine de la croûte antérieure à 4 milliards d’années, ou encore les relations entre le volcanisme et l’évolution des paramètres physico-chimiques de l’atmosphère martienne.
Notes :
(1) La fusion partielle se produit à l’intérieur du manteau, à une profondeur où les conditions de température et de pression sont réunies pour la fusion. Cette profondeur correspond à la base de la lithosphère (qui englobe la croûte et la partie supérieure du manteau).
Références :
Thermal history of Mars inferred from orbital geochemistry of volcanic provinces. D. Baratoux, M.J. Toplis, M. Monnereau, O. Gasnault. Nature, 6 avril 2011.
Source: communiqué de presse du CNRS
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