(Agence Science-Presse) – Avons-nous regardé au mauvais endroit, au mauvais moment, de la mauvaise façon? Les chercheurs d’extra-terrestres ne savent plus à quelle étoile se vouer.
Après 50 ans, toujours rien. Pas le plus petit signal amical en provenance de nos hypothétiques voisins galactiques. Et les chercheurs, qui se rencontrent cette semaine pour leur congrès annuel, se sentent en manque de créativité.
Le congrès, qui a lieu à l’Université d’État de l’Arizona à Tempe, est appelé, de manière assez appropriée, « Le son du silence » (Sound of Silence).
Cinquante ans, cela nous renvoie à l’époque où deux chercheurs ont, pour la première fois, utilisé délibérément leur radio-télescope pour tenter de capter quelque chose. Philip Morrison et Giuseppe Cocconi, de l’Université Cornell à Ithaca (dans l’État de New York) ont en effet réalisé que la technologie utilisée jusque-là pour capter le bruit de fond cosmique et autres émanations naturelles des étoiles et des nuages de gaz interstellaires pouvait tout aussi bien capter des émissions artificielles. Par exemple, un message ciblé, délibérément envoyé vers nous par une civilisation avancée.
Depuis ce temps, il y a toujours eu un ou des groupes pour tendre l’oreille —à l’origine, c’était vers une seule étoile bien ciblée; aujourd’hui, progrès de la technologie aidant, on peut écouter de nombreuses étoiles à la fois sur une multiplicité de fréquences en même temps. Avec des montagnes de données à analyser: c’est le coeur du projet SETI (Search for Extra-terrestrial Intelligence).
Mais rien ne fait osciller les capteurs. Aucune séquence de nombres premiers comme dans le film Contact. Pas de premier chapitre de l’Encyclopaedia Galactica. Même pas de transmission involontaire, comme un épisode de Perdus dans l’espace qui se serait perdu dans l’espace.
Et s’il était temps de transmettre nous-mêmes? « La grosse erreur de SETI a été de compter sur les E.T. pour faire tout le travail », résume dans le New Scientist Richard Gott, astrophysicien à l’Université Princeton (New Jersey). Peut-être qu’ils ont la même attitude que nous : « nous sommes tous là à écouter, mais personne ne parle ». L’idée a d’ores et déjà généré des débats dans la communauté, certains allant jusqu’à considérer « imprudents » les astrophysiciens qui expédient des messages à l’intention des E.T., peut-être hostiles qui sait…
Mais ce débat n’est rien à côté de celui qui a perturbé le congrès de cette année. Est-il possible que cela fasse 50 ans que les chercheurs écoutent au mauvais endroit? Notre façon de définir ce que serait un message E.T. (pulsations, sur une bande étroite, etc.) est, après tout, très limitative. « Nous faisons beaucoup de suppositions sur la base d’une société humaine, contemporaine, et occidentale », admet Paul Davies, de l’Université de l’Arizona, qui suggère, lui aussi, d’être plus créatif dans « notre » approche. Plus radical encore, Paul Shuch, de l’Institut SETI, demande tout haut si des signaux E.T. ne seraient pas déjà là, mais confondus dans ce que nous captons du reste du cosmos.
Cela voudrait dire qu’il faudrait éliminer tout ce qui ne peut être expliqué par le bruit de fond cosmique ou par des sources astrophysiques connues (pulsars, quasars, etc.). Mais ce serait un travail de titan, l’équivalent de chercher un trésor dans le Sahara en commençant à une extrémité du désert, avec une pelle. « Je ne vais pas perdre du temps à penser à des stratégies pour détecter quelque chose que, par définition, je ne peux concevoir », réplique Jill Tarter, une des chefs de file de SETI.
Combien de décennies encore, dans ce cas? L’an dernier, la première des 42 antennes du futur observatoire entièrement dédié à SETI, le Allen Telescope Array, est entrée en fonction. Les progrès de l’informatique accéléreront également le traitement des données. D’aucuns estiment que d’ici 2028, un million d’étoiles devraient avoir été scrutées. Une nouvelle échéance…
Source : Agence Science Presse
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