Des chercheurs de l’Université de Toulouse et de l’Université de Montréal ont détecté deux planètes aux dimensions comparables à celles de la Terre en orbite autour d’une vieille étoile venant de franchir le stade de géante rouge. Ce système planétaire est situé dans le voisinage des constellations du Cygne et de la Lyre, à environ 3900 années-lumière de notre planète. Cette découverte, qui sera publiée demain dans la prestigieuse revue Nature, pourrait apporter un éclairage nouveau sur la destinée des systèmes stellaires et planétaires.
« Les deux planètes, nommées KOI 55.01 et KOI 55.02, occupent des orbites très proches de leur étoile hôte, explique le professeur Gilles Fontaine, du Département de physique de l’Université de Montréal et membre du Centre de recherche en astrophysique du Québec (CRAQ). Pour s’être positionné à de si petites distances de leur étoile géante, elles ont probablement plongé profondément dans son enveloppe gazeuse et, malgré la température extrême, ont quand même survécu. » Leur étoile hôte, KIC 05807616, est le résidu d’un cœur de géante rouge mis à nu par la disparition presque totale de son enveloppe gazeuse. En plongeant dans leur hôte, les deux planètes ont dû contribuer à la perte de masse nécessaire à sa transformation en géante rouge, ce qui laisse croire que les systèmes planétaires pourraient ainsi influencer l’évolution de leurs étoiles hôtes. KIC 05807616, qui ressemblait à notre Soleil il y a des milliards d’années, n’est aujourd’hui que l’ombre d’elle-même : une étoile possédant un cœur d’hélium en fusion surmonté d’une mince couche d’hydrogène.
Les deux planètes découvertes sont probablement les restes de planètes géantes gazeuses, du type de Jupiter, orbitant près de leur étoile à une époque lointaine où celle-ci brûlait encore de l’hydrogène dans son noyau. Elles sont aujourd’hui des planètes chthoniennes, c’est-à-dire qu’elles sont devenues des noyaux rocheux ou métalliques dont l’enveloppe gazeuse se serait évaporée pendant la phase d’immersion dans leur étoile.
De chercheur d’étoiles à découvreur de planètes
Le professeur Gilles Fontaine est spécialisé dans la recherche d’étoiles et non de planètes. C’est en analysant les pulsations d’une étoile que la présence de deux corps non identifiés a été détectée. « Toutes les étoiles vibrent, elle émettent des pulsations, qui nous renseignent sur leur composition et leur structure. C’est par l’étude de ses pulsations qu’on peut identifier la présence d’une planète autour d’une étoile », explique-t-il. C’est donc en analysant les pulsations de l’étoile KIC 05807616 fournies par le satellite Américain Kepler (NASA) que son équipe – regroupant des astrophysiciens venant de huit pays différents – a remarqué la présence intrigante de deux infimes modulations périodiques. Ces modulations ne pouvant être attribuées aux oscillations de l’étoile ou à d’autres causes, la présence de deux corps en orbite autour de KIC05807616 s’est imposée comme la seule explication plausible.
Une découverte qui remet en question les connaissances actuelles
Ces deux planètes étaient extrêmement près de leur étoile, très chaude (27 000oC en surface) et au rayonnement intense. Il y régnait certainement des conditions effroyables, notamment dans l’hémisphère face à l’étoile où les températures pouvaient atteindre les 8 000 à 9 000oC. De telles conditions, jamais rencontrées à ce jour parmi les planètes extra solaires répertoriées, amènent nombre de questions sur la nature des corps susceptibles de survivre à un tel enfer. « C’est un environnement où les astrophysiciens ne s’attendaient pas à trouver la présence de planètes, soutient le professeur Fontaine. Notre découverte a battu plusieurs »records »: ces planètes sont les plus petites, les plus chaudes, les plus rapprochées de leur étoile et les plus rapides qui aient été observées jusqu’à maintenant, mais l’aspect le plus intéressant de notre découverte est que pour la première fois, on démontre que des planètes peuvent avoir un effet sur l’évolution de leur étoile », conclut-il.
À propos de cette étude
“A compact system of small planets around an evolved post red giant star” a été publié dans la revue Nature le22 décembre 2011. L’équipe de chercheurs a été dirigée par Stéphane Charpinet (Université de Toulouse) en collaboration avec ses anciens directeurs de thèse du Département de physique de l’Université de Montréal, Gilles Fontaine et Pierre Brassard. Deux autres anciennes doctorantes dans le groupe du professeur Fontaine à Montréal, Suzanna Randall (European Southern Observatory) et Valérie Van Grootel (Université de Liège), ont aussi participé aux travaux de l’équipe. Gilles Fontaine est le titulaire de la Chaire de recherche du Canada en astrophysique stellaire. Cette étude a été possible grâce aux financements du Fond de recherche du Québec – Nature et technologies et du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada.
À propos du CRAQ :
Le Centre de recherche en astrophysique du Québec (CRAQ) est un partenariat entre l’Université de Montréal, de l’Université McGill et de l’Université Laval, qui regroupe tous les chercheurs dans le domaine de l’astronomie et de l’astrophysique de ces trois institutions, et également des collaborateurs de l’Université Bishop’s, de l’Agence spatiale canadienne, du Cégep de Sherbrooke et d’entreprises privées (Photon etc., ABB Bomem Inc., Nüvü Caméras). Le CRAQ est un des regroupements stratégiques financés par Le Fonds de recherche du Québec – Nature et technologies (FRQ-NT). Le CRAQ constitue un pôle unique au Québec de chercheurs en astrophysique dont les expertises variées et complémentaires, axées sur l’excellence, leur permettent d’être innovateurs, créatifs et compétitifs dans plusieurs domaines scientifiques, offrant ainsi aux étudiants des cycles supérieurs un éventail important de sujets en recherche fondamentale et appliquée.
Source : Julie Gazaille – Université de Montréal
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