La recherche génétique prouve que le ver de terre a évolué vers une complexité réduite, comparativement à celle de ses ancêtres
Selon une étude publiée aujourd’hui dans Nature par une équipe de chercheurs dirigée par le professeur Hervé Philippe, du Département de biochimie de l’Université de Montréal, l’évolution n’est pas une marche constante vers des êtres de plus en plus sophistiqués et, par conséquent, la quête d’un chaînon manquant vivant n’est pas pertinente. « Aristote a été le premier à classifier les organismes, du plus simple au plus complexe. La théorie de l’évolution de Darwin a tablé sur cette notion, ajoutant l’idée d’une hiérarchie de l’évolution. Cette façon de penser a conduit des chercheurs – et des sceptiques – à chercher des ancêtres moins complexes, de manière à prouver ou réfuter l’évolution », a expliqué le professeur Philippe. « Ce que nous savons maintenant, c’est que l’évolution ne se produit pas dans une seule direction. Quand les gens parlent d’un chaînon manquant, ils mettent généralement de côté la possibilité d’ancêtres plus complexes. »
Les chercheurs ont comparé les génomes de deux espèces de vers marins présentant une morphologie simple, le xenoturbellida et l’acoelomorpha, avec ceux d’autres animaux. Ils ont démontré que leur ancienne position à la base du groupe des animaux à symétrie bilatérale – comprenant insectes, mollusques et vertébrés – n’était pas appropriée. « À la place, nous avons déterminé que le xenoturbellida et l’acoelomorpha sont très proches des deutérostomiens, une sous-division importante réunissant les oursins, les humains et les requins », a ajouté le professeur Philippe. « Je les ai placés dans cet ordre intentionnellement, parce que cela semble étrange, ce qui démontre notre tendance à toujours trier les organismes par ordre de complexité. » Ces découvertes signifient que les vers ont évolué à partir d’un ancêtre plus complexe, à travers d’importantes simplifications.
« Nous savions déjà que la plupart des organismes parasitaires ont évolué pour devenir moins complexes que leurs ancêtres; ils ont perdu certaines aptitudes dont ils n’ont plus besoin. Le xenoturbellida et l’acoelomorpha, qui vivent de façon indépendante, ne font pas partie de cette catégorie », a déclaré Hervé Philippe. Réalisée dans le cadre d’un projet s’échelonnant sur 20 ans et touchant à sa fin, l’étude est un exemple frappant du rôle important de la simplification secondaire dans l’évolution.
Source: William Raillant-Clark – Université de Montréal
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