Un système de reproduction inconnu jusqu’à ce jour chez une espèce proche de l’olivier, Phillyrea angustifolia L. vient d’être découvert par des chercheurs du laboratoire de Génétique et évolution des populations végétales (CNRS/Université de Lille 1) et du Centre d’écologie fonctionnelle et évolutive (CNRS/Université de Montpellier 1, 2 et 3/ENSA Montpellier/CIRAD/Ecole pratique des hautes études). Ce système explique chez cette espèce la présence élevée d’individus mâles en mélange avec des hermaphrodites. Ces hermaphrodites dont les fleurs portent les organes mâles et femelles, se répartissent en deux groupes non distinguables morphologiquement. Les plantes de chaque groupe sont stériles entre elles mais sont complètement fertiles avec celles de l’autre groupe. Dans ces conditions, le pollen des hermaphrodites ne peut féconder qu’un individu sur deux. En revanche, le pollen des mâles peut féconder tous les hermaphrodites. Ainsi le désavantage subit par les mâles est immédiatement compensé. Cette découverte montre pour la première fois que le passage de l’hermaphrodisme à la dioécie (1) est possible au cours de l’évolution. Ces travaux sont publiés dans la revue Science.
D’autre part, cette incompatibilité inter-hermaphrodites à deux groupes morphologiquement identiques est peut-être un mode de reproduction clé, à l’origine d’espèces à sexes séparés chez les plantes, via des systèmes de reproduction « intermédiaires ». En effet, dans le contexte général de l’évolution des systèmes de reproduction à partir de l’hermaphrodisme vers la dioécie (système où les sexes sont portés par des individus différents), les systèmes mixtes chez lesquels on observe la présence dans la même espèce de femelles et d’hermaphrodites (gynodioécie) ou la présence de mâles et d’hermaphrodites (androdioécie) sont considérés comme intermédiaires et dérivés de l’hermaphrodisme. Cependant, jusqu’à présent, les exemples empiriques montraient tous que l’androdioécie avait évolué à partir de systèmes dioïques grâce à l’acquisition d’une fonction mâle par les femelles et non à partir des systèmes hermaphrodites via la perte de la fonction femelle chez certains hermaphrodites. Ce travail montre pour la première fois que le passage de l’hermaphrodisme à l’androdioécie (2) est possible.
Cette découverte, chez des plantes hermaphrodites d’un système d’incompatibilité à seulement deux groupes non distinguables morphologiquement est tout à fait inattendue. L’un des défis des chercheurs est maintenant d’expliquer d’un point de vue fonctionnel le maintien à deux du nombre de groupes d’incompatibilité.
Notes :
(1) Système où les sexes sont portés par des individus différents
(2) Présence au sein des populations d’une même espèce d’individus hermaphrodites et d’individus mâles
Références :
A Self-Incompatibility System Explains High Male Frequencies in an Androdioecious Plant, P. Saumitou-Laprade, P. Vernet, C. Vassiliadis, Y. Hoareau, G. Magny (de), B. Dommee, J. Lepart, Science, 26 mars 2010.
Source: CNRS
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