Les scientifiques canadiens ont mis au point une nouvelle et puissante technique pour dépister les toxines responsables de l’intoxication par phycotoxine paralysante (IPP) – la cause la plus commune de maladie associée à la consommation de mollusques dans les pays côtiers.
Baptisée « chromatographie liquide à oxydation postcolonne » ou LC-PCOX, cette technique détecte plus rapidement la contamination des mollusques par les toxines IPP que le test usuel employé par la majorité des nations du globe. Les inspecteurs pourront « surveiller de près les mollusques dans telle ou telle région, et en interdire la récolte avant que la concentration de toxines dépasse le seuil de tolérance établi par la réglementation », a expliqué Michael Quilliam, chercheur principal à l’Institut des biosciences marines du CNRC (IBM-CNRC), à Halifax.
Selon M. Quilliam, l’épreuve habituelle d’essai biologique avec souris existe depuis les années 1950. Elle consiste à inoculer un extrait de mollusques à une souris, puis à examiner cette dernière en notant, le cas échéant, le moment de sa mort. « La méthode est excellente, souligne le chercheur, car elle suscite très peu de réactions faussement négatives, ce qui signifie qu’elle protège fort bien la population. »
Dans ce cas, pourquoi en chercher une meilleure?
Le problème est que cette technique détecte à peine les phycotoxines au seuil fixé par la réglementation, c’est-à-dire à la concentration la plus faible à laquelle on juge la consommation de mollusques insalubre. « Nous aimerions dépister les toxines dès qu’elles commencent à s’accumuler dans les mollusques », poursuit M. Quilliam. Avec une méthode moins sensible, les exportateurs courraient le risque d’expédier des mollusques contenant un peu plus de toxines que le seuil de tolérance, ce qui entraînerait la destruction de produits d’une valeur de plusieurs centaines de milliers de dollars par la suite.
Une autre difficulté de la méthode actuelle a trait aux souris. « Chaque année, on en sacrifie des dizaines de milliers partout dans le monde pour s’assurer que les mollusques sont sans danger », déplore le chercheur. Cédant sous la pression des groupes de protection des animaux, quelques pays d’Europe ont commencé à interdire de tels essais dans les années 1990, de sorte qu’on a besoin de nouvelles techniques de dépistage. « Le CNRC avait déjà pris les devants, car nous nous attachons à créer de nouvelles méthodes d’analyse chimique pour détecter les toxines de l’IPP depuis 1987 », reprend M. Quilliam.
Les études entreprises par le CNRC et son partenaire, l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA), révèlent que la LC-PCOX « détecte les toxines IPP aussi bien que le test sur les souris, avec légèrement moins de réactions faussement positives », précise le scientifique. Outre sa sensibilité supérieure, elle s’avère aussi plus rapide et moins dispendieuse quand les essais se font nombreux.
Au cours des mois à venir, l’ACIA compte réduire de beaucoup ses essais sur les souris en les remplaçant par la LC-PCOX, dans tous les laboratoires d’inspection des mollusques du Canada. Ailleurs, l’ancienne technique demeurera en place jusqu’à ce que le CNRC et l’ACIA réussissent l’étude de validation internationale qui permettra l’adoption de la nouvelle méthode à l’échelle de la planète.
Dans le cadre d’un projet connexe, le CNRC et l’ACIA œuvrent en étroite collaboration depuis plusieurs années en vue de créer les matériaux de référence certifiés (MRC) pour les phycotoxines sans lesquels on ne pourrait utiliser la LC-PCOX. Ce programme est le seul dans son genre au monde, et assure la distribution de MRC à une quarantaine de pays.
Qu’est-ce que l’intoxication par phycotoxine paralysante?
Les toxines causant l’intoxication par phycotoxine paralysante (IPP) comptent parmi les toxines biologiques marines les plus courantes et les plus dangereuses au monde. Elles sont libérées par les algues microscopiques qui forment parfois un tapis dense sur la mer avant de disparaître. Ces toxines s’accumulent dans les myes, les moules, les pétoncles et les huîtres de façon saisonnière. On en décèle périodiquement dans les mollusques pêchés sur les côtes nord et ouest du Canada et de la baie de Fundy.
Les symptômes d’une intoxication incluent des picotements et l’engourdissement des lèvres, de la langue, des mains et des pieds, ainsi qu’une déglutition difficile. Dans les cas les plus graves, il peut y avoir paralysie musculaire et respiratoire, puis le décès. Les programmes de dépistage ont fait de l’IPP une maladie très rare de nos jours, bien qu’elle continue d’affecter des centaines de personnes un peu partout sur le globe tous les ans, surtout dans les régions éloignées.
Plus sur le sujet
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Source: Communiqué de presse du Conseil National de Recherches du Canada
http://www.nrc-cnrc.gc.ca/fra/actualites/cnrc/2010/07/01/mollusques.html
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