Des équipes de l’INRA et du CNRS ont caractérisé le mécanisme de dégradation du bois d’un des champignons les plus dévastateurs, Serpula lacrymans, communément appelé la mérule pleureuse. Cette découverte ouvre la voie à l’élaboration de nouvelles techniques de lutte contre ce parasite et pourrait fortement intéresser le secteur de la bioénergie. Ces résultats sont publiés dans la revue Science du 14 juillet 2011.
La mérule est un champignon lignivore très répandu mais discret en forêt où il détruit les souches de feuillus comme de conifères. C’est cependant un redoutable colonisateur du bois œuvré. Il touche préférentiellement les charpentes, les escaliers et le bois d’œuvre de manière générale. Lorsque le champignon est visible cela signifie en général qu’il est trop tard. En effet, son développement se fait dans des conditions d’obscurité et de faible ventilation, ce qui rend souvent sa détection précoce difficile. La pourriture apparaît dans l’ultime phase de dégradation et les dégâts sont alors considérables, voire irréversibles.
Dans le cadre d’un vaste projet de séquençage d’une cinquantaine de génomes de champignons forestiers, mené par le Joint Genome Institute, des chercheurs de l’unité Inra/Université de Nancy « Interactions Arbres/Microorganismes » associés à des équipes de l’unité CNRS/Universités Aix-Marseille 1&2 « Architecture et Fonctions des Macromolécules » et des Universités de Swansea et Oxford, ont analysé la séquence génomique de S. lacrymans. En comparant le répertoire de gènes de plusieurs champignons dégradant le bois, les scientifiques ont pu caractériser le mécanisme de dépolymérisation de la lignine chez la mérule. La plupart des champignons utilisent des enzymes pour dégrader le bois. Par contre, les pourritures brunes, dont fait partie la mérule, produisent dans les premières étapes de la destruction du bois de grandes quantités de radicaux libres hydroxyles. Ces derniers provoquent une réaction très puissante qui permet de casser la couche de lignine et d’atteindre la cellulose, dont se nourrit le champignon.
Ces résultats apportent également une meilleure compréhension de l’évolution des champignons forestiers et de leur l’écologie. La connaissance du mécanisme d’action en jeu dans la dégradation du bois par la mérule favorisera la mise au point de moyens de lutte contre ce champignon, véritable fléau du bâtiment. Ces résultats ont aussi un intérêt pour le secteur des bioénergies, la dégradation des polymères du bois étant un processus important dans la fabrication de biocarburant.
Références :
The plant cell wall decomposing machinery underlies the functional diversity of forest fungi. Science, 14 juillet 2011
D.C.Eastwood, D.Floudas, M.Binder, A.Majcherczyk, P.Schneider, A.Aerts, F.O.Asiegbu, S.E.Baker, K.Barry, M.Bendiksby, M.Blumentritt, P.M.Coutinho, D.Cullen, R.P.de Vries, A.Gathman, B.Goodell, B.Henrissat, K.Ihrmark, H.Kauserud, A.Kohler, K.LaButti, A.Lapidus, J.L. Lavin, Y-H.Lee, E.Lindquist, W.Lilly, S.Lucas, E.Morin, C.Murat, J.A.Oguiza, J.Park, A.G.Pisabarro, R.Riley, A.Rosling, A.Salamov, O.Schmidt, J.Schmutz, I.Skrede, J.Stenlid, A.Wiebenga, X.Xie, U.Kües, D.S.Hibbett, D.Hoffmeister, N.Högberg, F.Martin, I.V.Grigoriev, S.C.Watkinson
Source : communiqué de presse du CNRS
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