Des outils humains excluent que le peuplement Clovis soit le premier d’Amérique du Nord
Des chercheurs ont découvert au Texas des dizaines de milliers d’artefacts humains dans des sédiments situés directement sous un assemblage de vestiges de culture Clovis, preuve de plus que d’autres culture ont précédé celle de Clovis en Amérique du Nord. Cet outillage pré-Clovis semble vieux de 13 200 à 15 500 ans et présente une technique de fabrication de biface et de lame qui a pu être adaptée et améliorée par la culture Clovis ultérieurement.
On supposait jusqu’alors que les hommes de Clovis, dont les outils se reconnaissent à leurs pointes « cannelées », étaient les premiers habitants de l’Amérique du Nord il y a environ 13 000 ans. Ces dernières années, des vestiges avaient toutefois suggéré l’existence de plusieurs cultures antérieures mais leur rareté faisait que la question était encore débattue.
Le nouveau site découvert au Texas, connu sous le nom de Debra L. Friedkin, nous renseigne sur un campement pré-Clovis dans la région et apporte aux chercheurs des informations sur la transition vers la culture et la technique de Clovis qui a ensuite été retrouvée en Amérique du Nord, en Amérique centrale et aussi dans le nord de l’Amérique du Sud. Ces nouveaux artefacts constituent ce que les chercheurs appellent le complexe de Buttermilk Creek et les détails de la fouille seront donnés dans le numéro du 25 mars de la revue Science publiée par l’AAAS, la société scientifique à but non lucratif.
Michael Waters de l’Université Texas A&M et ses collègues issus du reste des États-Unis décrivent les diverses lames, grattoirs et choppers qu’ils ont trouvés parmi les 15 528 artefacts du complexe de Buttermilk Creek. Ils ont utilisé la datation par luminescence qui mesure l’énergie lumineuse piégée dans les grains de sédiment pour dater la couche de terre épaisse de 20 cm qui contenait l’assemblage.
« Sur le site Debra L. Friedkin au Texas, nous avons trouvé les traces d’une première occupation humaine… 2 500 avant celle de Clovis » indique M. Waters. « Ceci en fait le plus ancien site archéologique crédible du Texas et d’Amérique du Nord, un élément important dans le débat sur la chronologie de la colonisation du continent américain et de l’origine de la culture Clovis. »
Les outils mis au jour, petits et faits de chert, formaient selon les chercheurs un outillage portable qui pouvait facilement être emballé et transporté. Ils se distinguent de ceux de Clovis, même s’ils s’en rapprochent notamment par l’utilisation d’une technique de biface et de lamelle.
Les hommes de Clovis étaient autrefois présentés comme les plus anciens habitants des Amériques. Ce modèle de « Clovis en premier » avançait qu’ils étaient arrivés du nord-est de l’Asie dans le Nouveau Monde via le Pont terrestre de Béring qui a jadis relié l’Asie à l’Amérique du Nord. Puis il suggérait que ces premiers humains s’étaient disséminés sur le continent et avaient fini par atteindre l’Amérique du Sud.
Ce modèle avait cependant montré récemment ses limites. En premier lieu, aucune technique Clovis n’a été trouvée dans le nord-est de l’Asie et les pointes cannelées retrouvées en Alaska sont trop récentes pour être de culture Clovis et en diffèrent aussi légèrement. De plus, il existe six sites en Amérique du Sud qui ne présentent pas la culture Clovis bien qu’ils lui aient été contemporains.
Le site Debra L. Friedkin au Texas montre que les outils Clovis ont pu évoluer à partir de ceux trouvés dans le complexe de Buttermilk Creek et que la culture Clovis, dont les pointes cannelées, s’est probablement développée en Amérique du Nord.
« Cette découverte indique que la culture Clovis a eu amplement le temps de se développer » ajoute Waters. « Les hommes [du complexe de Buttermilk Creek] ont pu expérimenter avec les roches et inventer les armes et les outils que nous qualifions aujourd’hui de Clovis… Pour résumer, il est temps d’abandonner une fois pour toutes le modèle « Clovis en premier » et d’en élaborer un autre pour le peuplement des Amériques. »
Cette étude de Waters et coll. a été financée par le programme de recherche archéologique North Star, la Chaire d’études des Premiers Américains et des dons de MM. Mullins, R. Wilson, R. Shlemon, B. Rotstan, R. Engle, E. Guerri, G. Moore, T. Cloninger, S. Kohntopp, M. Payn, J. Pytkowicz et les membres du Center for the Study of the First Americans.
Cette recherche a été soutenue par la National Science Foundation.
Source: Natasha Pinol – AAAS
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