Une équipe de chercheurs de l’Université Laval et de la compagnie Danisco vient de percer le secret du fonctionnement du système immunitaire de certaines bactéries. Les détails de cette découverte, qui pourrait permettre à terme d’empêcher une bactérie de devenir résistante aux antibiotiques, sont présentés dans l’édition du 4 novembre de la revue scientifique Nature.
L’équipe dirigée par Sylvain Moineau, professeur au Département de biochimie, de microbiologie et de bio-informatique de l’Université Laval, a démontré que le mode d’action de ce mécanisme immunitaire, appelé CRISPR/Cas, consiste à sélectionner des segments d’ADN étrangers puis à les intégrer à des endroits bien précis dans le bagage génétique de la bactérie, ce qui la protège contre de futures invasions.
Les chercheurs ont fait la démonstration de ce mécanisme à l’aide de plasmides, des molécules d’ADN que s’échangent régulièrement les bactéries. Le plasmide utilisé, qui contenait un gène de résistance à un antibiotique, a été inséré dans des bactéries utilisées dans la fabrication du yogourt, Streptococcus thermophilus. Certaines de ces bactéries ont intégré dans leur génome les segments d’ADN provenant du gène de résistance et les tentatives subséquentes pour introduire le plasmide dans ces bactéries ont échoué. « Les bactéries étaient tout simplement devenues immunisées contre l’acquisition du gène de résistance », commente le professeur Moineau. Ce phénomène pourrait expliquer, entre autres, pourquoi certaines bactéries deviennent résistantes aux antibiotiques alors que d’autres non. »
Le système immunitaire CRISPR/Cas protège également les bactéries contre les infections aux bactériophages, un groupe de virus qui s’attaque spécifiquement aux bactéries. Cela rend la découverte du professeur Moineau et de son équipe particulièrement intéressante pour les entreprises alimentaires et biotechnologiques qui utilisent des cultures bactériennes, notamment l’industrie des yogourts, des fromages et des probiotiques. La contamination des cultures bactériennes par les bactériophages est un problème qui cause d’importantes pertes financières pour ces entreprises.
Outre Sylvain Moineau, les auteurs de cette étude sont Josiane Garneau, Marie-Ève Dupuis, Manuela Villion et Alfonso H. Magadán de l’Université Laval, ainsi que Dennis A. Romero, Rodolphe Barrangou, Patrick Boyaval, Christophe Fremaux et Philippe Horvath de la compagnie Danisco.
Source: Jean-François Huppé – Université Laval
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