Une nouvelle image grand champ publiée aujourd’hui par l’ESO montre plusieurs milliers de galaxies éloignées et, en particulier, un grand groupe appartenant à l’amas massif de galaxies, connu sous le nom d’Abell 315. Aussi bondé qu’il puisse apparaître, cet ensemble de galaxies représente seulement, selon le proverbe, la “partie émergée de l’iceberg “, car Abell 315 – comme la plupart des amas de galaxies – est dominé par la matière noire. La masse énorme de cet amas dévie la lumière des galaxies situées en arrière-plan, altérant légèrement leurs formes observées.
Lorsque l’on regarde le ciel à l’œil nu, on ne voit la plupart du temps que les étoiles de notre Galaxie, la Voie Lactée et quelques une de ses galaxies voisines les plus proches. Les galaxies plus éloignées sont simplement trop peu brillantes pour être perçues par l’œil humain, mais si nous pouvions les voir, elles couvriraient littéralement le ciel. Cette nouvelle image publiée par l’ESO est à la fois grand champ et longue pose : elle montre donc des milliers de galaxies recouvrant une surface dans le ciel pratiquement aussi grande que celle de la pleine Lune.
Les distances qui nous séparent de ces galaxies sont très variées. Certaines sont relativement proches et il est possible de distinguer leurs bras spiraux ou leurs halos elliptiques, en particulier dans la partie supérieure de l’image. Les plus éloignées apparaissent comme les « taches » les moins lumineuses, leur lumière ayant voyagé à travers l’univers pendant huit milliards d’années ou plus, avant d’atteindre la Terre.
En partant du centre de l’image et en prolongeant vers sa partie inférieure gauche, une concentration d’environ une centaine de galaxies jaunâtres indique un amas massif de galaxies, désigné sous le numéro 315 dans le catalogue réalisé par l’astronome américain George Abell en 1958 [1]. L’amas est situé entre les galaxies rouges et bleues peu lumineuses et la Terre, à environ deux milliards d’années-lumière. Il se situe dans la constellation de la Baleine.
Les amas de galaxies font partie des plus grandes structures de l’univers liées par la gravitation. Mais dans ces structures il y a bien plus que les nombreuses galaxies que nous pouvons voir. Dans ces structures géantes, les galaxies représentent seulement dix pour cent de la masse ; s’y ajoute du gaz chaud entre les galaxies qui représente également dix pour cent [2]. Les 80 pour cent restants sont faits d’un composant invisible et inconnu appelé matière noire (ou matière sombre) qui se trouve entre les galaxies.
La présence de la matière noire est révélée par son effet gravitationnel : l’énorme masse d’un amas de galaxies agit sur la lumière des galaxies situées derrière l’amas comme une loupe cosmique, déviant la trajectoire de la lumière et faisant de ce fait apparaître les galaxies légèrement déformées [3]. En observant et en analysant les formes tordues de ces galaxies d’arrière-plan, les astronomes peuvent déduire toute la masse de l’amas responsable de la déformation, même si cette masse est majoritairement invisible. Cependant, cet effet est habituellement minuscule et il est nécessaire de le mesurer sur un nombre important de galaxies pour obtenir des résultats significatifs : dans le cas d’Abell 315, les formes de presque 10 000 galaxies peu lumineuses de cette image ont été étudiées afin d’estimer toute la masse de l’amas, qui s’élève à plus de cent mille milliards de fois la masse de notre soleil [4].
Pour compléter la très large gamme de tailles et de distances cosmiques représentées dans cette image, une poignée d’objets – bien plus petits que les galaxies et les amas de galaxies et beaucoup plus proches de la Terre – est disséminée dans tout le champ : outre quelques étoiles appartenant à notre Galaxie, de nombreux astéroïdes sont également visibles sous forme de traînées bleues, vertes ou rouges [5]. Ces objets appartiennent à la ceinture principale d’astéroïdes, située entre les orbites de Mars et de Jupiter. Leurs dimensions varient de quelques dizaines de kilomètres, pour les plus brillants, jusqu’à quelques kilomètres dans le cas des plus faibles.
Cette image a été prise avec la caméra grand champ (Wide Field Imager – WFI) du télescope MPG / ESO de 2,2 mètres de l’Observatoire de l’ESO à La Silla au Chili. L’image est une composition de plusieurs prises de vues acquises au moyen de trois filtres différents à large bande, pour un total de près d’une heure dans le filtre B et environ une heure et demie dans les filtres V et R. Le champ est de 34 x 33 minutes d’arc.
Notes
[1] Le catalogue d’Abell de 1958 contenait 2712 amas de galaxies, auxquels se sont ajoutés 1361 amas additionnels en 1989. Abell a assemblé cette collection impressionnante par inspection visuelle des plaques photographiques du ciel, cherchant les régions où, à distance égale de la Terre, on trouvait davantage de galaxies que la moyenne.
[2] Dix pour cent de la masse des amas de galaxies se composent d’un mélange très chaud de protons et d’électrons (un plasma), avec des températures allant jusqu’à dix millions de degrés ou plus, ce qui le rend visible par les télescopes à rayons X.
[3] Les astronomes appellent ces effets de faibles distorsions des effets de « lentille gravitationnelle faible », par opposition aux effets de lentille gravitationnelle forte, caractérisés par des phénomènes spectaculaires tels que des arcs géants, des anneaux et des images multiples.
[4] Une étude de lentille gravitationnelle faible de l’amas de galaxies Abell 315 a été publiée dans un article paru dans Astronomy & Astrophysics en 2009 (“Weak lensing observations of potentially X-ray underluminous galaxy clusters”, par J. Dietrich et al.).
[5] Les traces bleues, vertes ou rouges indiquent que chaque astéroïde a été respectivement détecté par l’un des trois filtres. Chaque trace est composée de plusieurs petites sous-traces, qui reflètent les multiples séquences de prise de vues réalisées avec chacun des filtres ; la distance à l’astéroïde peut être calculée à partir de la longueur de ces sous-traces.
Plus d’informations
L’ESO – l’Observatoire Européen Austral – est la première organisation intergouvernementale pour l’astronomie en Europe et l’observatoire astronomique le plus productif au monde. L’ESO est soutenu par 14 pays : l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, le Danemark, l’Espagne, la Finlande, la France, l’Italie, les Pays-Bas, le Portugal, la République Tchèque, le Royaume-Uni, la Suède et la Suisse. L’ESO conduit d’ambitieux programmes pour la conception, la construction et la gestion de puissants équipements pour l’astronomie au sol qui permettent aux astronomes de faire d’importantes découvertes scientifiques. L’ESO joue également un rôle de leader dans la promotion et l’organisation de la coopération dans le domaine de la recherche en astronomie. L’ESO gère trois sites d’observation uniques, de classe internationale, au Chili : La Silla, Paranal et Chajnantor. À Paranal, l’ESO exploite le VLT « Very Large Telescope », l’observatoire astronomique observant dans le visible le plus avancé au monde et VISTA, le plus grand télescope pour les grands relevés. L’ESO est le partenaire européen d’ALMA, un télescope astronomique révolutionnaire. ALMA est le plus grand projet astronomique en cours de réalisation. L’ESO est actuellement en train de programmer la réalisation d’un télescope européen géant – l’E-ELT- qui disposera d’un miroir primaire de 42 mètres de diamètre et observera dans le visible et le proche infrarouge. L’E-ELT sera « l’œil tourné vers le ciel » le plus grand au monde.
Source: ESO
philippe dit
je suis pasteur de formation et professeur de theologie
je voudrais recevoir de votre part les informations sure sur le nombre de galaxies, les distances qui les separent, la vitesse exacte de lumiere lunaire par seconde c’est toujours 300.000 km par seconde ? ou il y a un changement de decouvertes…. j’aimerais tout le detail svp.
Merci
Planet Techno Science dit
Bonjour,
Il est difficile d’être précis lorsqu’il s’agit de parler de nombre d’étoiles ou de galaxies. Toutefois, leur nombre est si impressionnant et impossible à calculer, que l’on estime leur nombre à plusieurs milliards. Concernant les distances, elles sont variables et peuvent être de l’ordre de 2.5 millions d’années lumières entre notre plus proche voisine la galaxie d’Andromède et nôtre galaxie, la Voie Lactée. Les galaxies les plus éloignées sont à plusieurs milliards d’années lumières, 15, peut-être 20, on s’en approche en tout cas avec l’évolution en therme de performances des nouveaux instruments d’observations astronomiques.
En ce qui concerne la vitesse de la lumière, elle est de 299 792 458 m/s. On peut arrondir à 300 000 Km/s.
Si vous souhaitez d’autres renseignements n’hésitez pas.
Cordialement.